Le Slowpreneuriat et l’entreprise régénérative sont des sujets en plein essor, et c’est une bonne chose pour moi qui chemine sur cette voie depuis 2017. Pourtant, j’ai remarqué que les entrepreneurs ont encore parfois du mal à comprendre ce que cela pouvait signifier pour eux.
Les mots “guérison” et “slow” sont loin d’être sexy dans un monde ou la culture entrepreneuriale est basée sur la masculinité et la vitesse, et j’ai rencontré de nombreux entrepreneurs éco-engagés réticents à utiliser le terme de slowpreneuriat. Cependant, la vitesse et le trop-plein d’énergie yang du monde des affaires nous ont rendu malades. Burn out, cancer et l’électro-sensibilité grandissante chez les entrepreneurs sont des symptômes que l’on ne peut plus nier.
Le Slowpreneuriat est une démarche active et profonde qui implique de sortir des habitudes dégénératives et soutenir la capacité de nos systèmes (nous, nos entreprises et la société) à se régénérer, c’est-à-dire à soutenir notre guérison et notre vitalité dans son intégrité.
C’est une démarche courageuse, car nous vivons dans une ère où les réflexions et les conversations restent en surface. Un monde d’extraction, où notre état d’esprit favorise jeu à somme nulle, avec des gagnants et des perdants. Après des siècles de telles pratiques commerciales, nous sommes aussi entrées dans une ère de communication toxique où un hashtag parait suffire pour occuper un espace que l’on ne se donne pas la peine d’explorer en profondeur. Une ère, où les marketeux sont friands de nouveau concept et ouvrent les portes à tous les washing. Une ère où tout va si vite, que des vingtenaires s’autoproclament mentors et font des burn out étudiants
Ce modèle est dégénérescent.
Nous sommes entrés dans un déclin de la qualité même de la vie sur terre – en raison de la perte de biodiversité, de la qualité de l’air et de l’eau et d’innombrables autres ressources vitales. Ce n’est la faute de personne et de chacun de nous à la fois, une conséquence logique et naturelle de l’approche de chacun pour soi – le mode d’extraction et de concurrence généralisé que nous avons appris à considérér comme normal.
Dans ce monde, où certains busYness s’achètent un positionnement en te parlant de slow, je déplore l’émergence d’un slowpreneuriat individualiste et égocentrique, là où en tant que pionnière du mouvement, j’ai pensé, rêve et partagé une approche collective pour un monde nouveau.
Changer de paradigme commence par changer d’état d’esprit
Si l’on applique ces termes de Slowpreneuriat et de régénération avec l’état d’esprit extractif du capitalisme industriel, nous changerons de mots sans changer de paradigme.
Nous précipiter dans le “comment faire”, chercher une méthode magique et unique en 7 points, comme on a été habitué à le faire dans un monde régit par la pensée mécaniste, serait une erreur. Changer de paradigme commence par changer d’état d’esprit. Ce que j’entends par Slowpreneuriat, ce n’est pas, comme le disent certains “travailler moins mais mieux” : il y a déjà des tas de méthodes de productivité et d’organisation qui théorisent ce mantra, nul besoin de créer un nouveau mot pour cela.
Le Slowpreneuriat est un acte d’amour. Un acte de Self-leadership puissant pour soi, pour les autres et le monde. C’est décider de remettre en question sa vision du monde. La raison d’être de son business. Son business model. Ses pratiques relationnelles. Le Slowpreneuriat, c’est une belle aventure, qui commence par prendre le temps de ralentir son électricité mentale et émotionnelle, favorisée par le monde de l’internet. Et reconnaitre les dommages profonds qui ont été subis par les gens, par d’autres espèces, par les écosystèmes du fait de nos choix et non-choix de consommation et de production.
Le Slowpreneuriat est certes une invitation à changer de narratif collectif, mais cela commence par une invitation à la guérison. Et cela ne passe pas par se précipiter dans un nouveau concept à la mode, tout en continuant à piller les ressources de la Terre, ou en braquant le contenu et les idées de ceux qui ont cheminé avant nous. Citons nos sources, honorons les pionniers qui nous ont inspiré et ont cheminé avant-nous pour ne pas reproduire une colonisation des idées dignes de l’ancien monde.
Sur quel sol pousse ton slowpreneuriat ?
Réduire la charge mentale et émotionnelle l’on peut ressentir dans l’entrepreneuriat conventionnel et prospérer en tant qu’humain sur cette planète, passe par une guérison individuelle et collective. La nôtre, celle des autres entrepreneurs de notre marché et celle de la planète.
Nous ne pouvons pas envisager le Slowpreneuriat comme une démarche hédoniste individualiste.
S’ancrer, planter des graines et les arroser, c’est bien. Mais rien ne pousse sur sol toxique et appauvri, même de belles graines bio. Il s’agira pour celui/celle qui souhaite emprunter la voie du slowpreneuriat, de commencer par détoxifier et guérir son sol : son rapport aux temps, à soi-même et aux autres. Par questionner les mots que nous employons et leur sens. Questionner ses pratiques et ses appropriations.
Pour que l’entrepreneuriat évolue, nous devons commencer par changer d’état d’esprit et approfondir la conversation.
- Qu’est-ce qui aiderait les hommes, frileux à utiliser le terme de slowpreneuriat, à trouver le courage de parler de la guérison qui pourrait être nécessaire dans leur vie et leur entrepreneuriat plutôt que de technique de productivité ?
- Qu’est-ce qui aiderait les femmes, pourtant friandes du mot sororité, à se désengager des pratiques de compétition, de concurrence et d’individualisme hérité du patriarcat, et à ne pas infuser de dynamique nombriliste dans leur slowpreneuriat, là où une véritable approche collective et coopérative semble la voie de la guérison ?
- Comment pouvons-nous rendre son intégrité au terme de slowpreneuriat, en y intégrant une notion de soin, de guérison et de collaboration, afin que la transformation de l’entrepreneuriat soit durable et régénératrice pour nous, mais aussi les autres et Gaïa ?
C’est cette réflexion que j’aimerais initier avec la communauté Les Slowpreneurs.
Comment Descartes et Darwin ont nuit à l’entrepreneuriat
Je crois sincèrement dans le pouvoir du slowpreneuriat.
Là où l’humanité occidentale a vidé le monde de ses vivants, non seulement avec son modèle économique, mais aussi avec ses mots et ses concepts, nous pouvons encore changer les choses.
La vision mécanique du monde, chère à Descartes, combinée à la vision réductive de l’évolution de Darwin, ont appauvri le réel et posé les bases d’un monde réglé par la concurrence. Nous avons perdu de vue que la nature est source d’harmonie et la coopération. “Je pense donc je suis” est l’axiome du Péché originel que nous trainons encore aujourd’hui comme un boulet. Donnant toute puissance à la tête, il nous a séparé du coeur, du corps, mais aussi du reste du Vivant, là où un “je sens, donc je suis” nous aurait lié, ouvert un monde qui inclut d’autres espèces, comme le soulignait le naturaliste Kinji Imanishi.
Nous avons fait de la nature un objet mécanique, sans âme, dans lequel on peut puiser sans réciprocité. “Je prends donc je suis”, nouvel axiome de la révolution industriel à largement contribuer à façonner l’état d’esprit des entrepreneurs. Quand au “j’achète donc je suis”, de la société de consommation, il n’a fait que continuer a légitimé cette vision extractive, qui a façonné jusqu’à aujourd’hui notre façon d’entreprendre et de faire société.
Arrêtons-nous un instant sur ce mot « entreprendre ». Son étymologie est guerrière, extractive elle-aussi. On pille des ressources naturelles. On prend du « temps de cerveau », on déclare la guerre économique aux entrepreneurs de nos marchés. Il y a tant de peur et si peu d’amour dans nos relations au vivant !
En écrivant cet article, je réalise que je préfère me considérer comme une entre-offreuse (bien que ce terme soit vraiment laid!), qui offre ce que j’ai de meilleur aux autres. Une entremetteuse, qui sert d’intermédiaire entre ta vie d’avant et ton passage au slowpreneuriat. Je ne prends pas sans rien donner, j’oeuvre et je contribue à la prospérité économique de mon éco-système.
Depuis que je me suis formée à l’art des Mantras avec Patrick Torre il y 10 ans, je suis sensible à la vibration subtile des mots. Et toujours amusée de ce que la langue des oiseaux nous apprend. Entre-prendre m’évoque un univers extractif auquel je ne souhaite plus participer. J’aspire à nourrir l’amour et la gratitude. Cela peut paraitre niais, mais dans le fond, c’est ce qui m’anime dans ma quête de vitalité. Et si tu connais les travaux de Masaru Emoto, tu sais que c’est une première étape de guérison nos corps composés à 80% d’eau.
Le Slow marketing ou l’art de vendre autrement
Notre monde patriarcal évite le sujet de la guérison peu viril, et pourtant il use d’un marketing de la douleur, qui appuie ou ça fait mal et où ça fait peur pour vendre.
Guérir, régénérer nos pratiques business, passe aussi par détoxifier nos pratiques de marketing.
De nombreux slowpreneurs, entrepreneurs hypersensibles, coach en bienêtre, thérapeutes ou créatif engagés considèrent le marketing comme une pratique extractive. Et quand le mensonge, la manipulation et le manque d’intérêt évident pour le bien-être de ceux à qui tu t’adresses est monnaie courante, c’est le cas.
Les approches de slow marketing, telles qu’ébauchées aujourd’hui prônent la créativité, la transparence et l’authenticité, pour remettre le dialogue et la confiance dans une pratique écornée par les excès du monde entrepreneurial et du busYness.
Pourrions-nous aller une étape plus loin et placer aussi la réciprocité au coeur de la relation commerciale, afin que nos échanges soient fluides et harmonieux ? La vente est une relation entre deux êtres, pas un exercice de persuasion. La réciprocité, c’est reconnaitre que ce que j’offre à de la valeur d’une part, et d’autre part que l’autre est souverain dans son choix, qu’il sait reconnaitre ce qui est bon pour lui, qu’il est libre de recevoir mes savoir-être/faire et produits et y investir avec enthousiasme pour sa transformation.
Si l’on ralenti le bruit de notre mental et de nos émotions, chacun d’entre nous ce qui est bon pour lui et chacun peut cultiver la confiance : en soi, en l’autre, en la vie. A mes yeux, le Slow Marketing intègre donc une bonne dose de lâcher prise et de foi. Il s’agit d’apprendre à offrir et à recevoir depuis l’espace de nos coeurs. C’est en tout cas la voie que j’explore aujourd’hui dans mon slowpreneuriat et lors de mes accompagnements.
La collaboration ou l’art de réseauter autrement
Au-delà de nos clients et du marketing, c’est nos relations étendues aux autres entreprises et entrepreneurs de nos marchés que nous devrions apprendre à repenser avec le slowpreneuriat. Sortir du mindset extractif, c’est comprendre l’importance des ressources immatérielles que sont les ressources relationnelles avec les entreprises de notre écosystème.
Changer de regard et considérer les autres entrepreneurs comme des alliés, comme un mycelium interconnecté avec qui nous partageons notre sol, c’est permettre à nos arbres-entreprises de se développer dans des écosystèmes de manière saine.
C’est exactement l’intention que j’insuffle dans Mycélium, le réseau de slowpreneurs que je facilite depuis quelques mois.